La guerre de Cent ans : à Bacouel,  à deux pas du Ponthieu : base arrière des Anglais, on est plein dedans !  50 ans après la catastrophique défaite de Crécy le 26 août 1346, les Français reprennent au printemps 1413 le contrôle de Paris. On se remet à espérer.

A Bacouel, bien des habitants sont morts ou disparus ; la lande a regagné des champs abandonnés effaçant les limites des parcelles. On  entame alors un grand chantier : il s’agit d’établir un document décrivant chaque parcelle, ses limites naturelles, ce qu’on sait de ses précédents exploitants et des conditions de leur « cens », de manière à pouvoir passer de nouveaux baux.

Ce terrier, première forme du cadastre, a l’aspect d’un rouleau de 30 centimètres de large et de plus de 3 mètres de long, fait de feuilles de parchemin cousues. Une chance, il est rédigé en Français, langue qui ne sera pourtant rendu obligatoire dans les actes administratifs que plus d’un siècle après ; il était sacrément en avance notre géomètre de BaScouel ! (orthographe de l’époque)

Le parchemin de 1414 comporte 99 articles.  L’archiviste Yves Estienne nous propose sa traduction de l’article 57 :

item, et a en ce renc une masure que sambloit possesser Jehan le Baillu, lequelle est de présent en le main du seigneur de Bascouel, et à coste au manage devant dit et au manoir Robert de le Haye, auquel manoir estoient appendant plusieurs terres, qui peu ou nient valent, et aussy est le manoir de petit pris, et semblait devoir VI deniers, un pain, et une poule à le Saint Firmin, IIII sol, sept septiers d’avoine à la  Saint Rémy, et au Noel II cappons, un pain et une corvée en mars et les d. terres, rentes et don quant elles étoient abbayés. Et pour ce que on n’a peu trouver qui l’ait volu prendre à cens, elle est baillié à louage par VI sols l’an pour toutes  coses. Lequelle masure demoura à ceste partie, et le pourra bailler à cens s’il lui plaist.

Il est à craindre que le travail de notre brillant juriste de Bacouel n’ait pas connu une bonne fin. Fin 1414, la paix d’Arras marque la fin de l’accalmie, car en 1415 à Azincourt – encore une fois au Nord de la France-  la France retourne en enfer pour un  autre demi-siècle.

défaits Crésy Azincourt

Source : archives départementales de la Somme